lundi 13 juillet 2015

Comment doit réagir l'employeur en cas de canicule ?

Merci à Coralie Seraille Responsable d'agence, à Synergie pour le partage


Par L'Atelier de l'Emploi, le 01 juillet 2015, dans la catégorie : Eureka
EURÊKA. Comment doit réagir l'employeur en cas de canicule ? Si le droit du travail impose la protection de la santé des employés, il ne précise pas le seuil à partir duquel les températures présentent un risque.
Vous avez chaud ? Pas de doute, l'été est là. Et tandis que la température augmente, le rythme de travail des français diminue sensiblement et les bureaux se vident des premiers juillettistes.Mais quand le thermomètre dépasse les 35 degrés, nombreux sont les salariés à s'interroger sur les risques liés au travail en période caniculaire.

L'Atelier de l'emploi revient sur plusieurs articles du code du travail qui évoquent le sujet des fortes chaleurs et listent des points à respecter pour l'employeur.
Le B.A-BA de la protection des salariés

Le code du travail impose à l'employeurla protection de la santé de ses salariés, c'est donc à lui d'évaluer le danger et de mettre en œuvre les mesures qui assureront la sécurité de ses collaborateurs.

Selon l'article R.4221-1, l'air des locaux fermés doit être renouvelé de manière à éviter les élévations exagérées de température. Quelques précisions peuvent être trouvées dans l'article R 4213-7 : "Les équipements et caractéristiques des locaux de travail sont conçus de manière à permettre l'adaptation de la température à l'organisme humain pendant le temps de travail, compte tenu des méthodes de travail et des contraintes physiques supportées par les travailleurs". Mais n'apportent finalement pas d'éléments concrets.




Pour les salariés travaillant en extérieur le code du travail est, lui aussi, relativement succinct et évoque une protection contre les conditions atmosphériques : mise à disposition d'abris ou locaux climatisés, création de zones d'ombre... Un impératif cependant : tous les employés doivent avoir à disposition de l'eau fraîche et potable. Concernant le BTP, où les ouvriers sont particulièrement exposés à la chaleur, la loi est plus spécifique et prévoit au moins trois litres d'eau par jour et par travailleur.
A partir de 33°C : danger !

Si le code du travail ne précise la température à partir de laquelle il devient dangereux de travailler, l'INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité) estime que la chaleur constitue un risque à partir de 28°C pour les travailleurs dont l'activité est essentiellement physique et 30°C pour les employés sédentaires... La température recommandée se situant entre 28 et 30°C.

Quand le thermomètre atteint les 33°C, l'INRS parle de forte chaleur et alerte sur les dangers potentiels pour la santé des salariés. La CNAMTS (Caisse Nationale de l'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés) va jusqu'à recommander l'évacuation des bureaux si le système de climatisation est en panne et que la température dépasse les 34°C.




Que faire alors quand la canicule s'installe ? L'INRS a publié plusieurs préconisations :
aménagement des horaires de travail afin d'éviter les heures les plus chaudes,
augmentation de la fréquence de pause de récupération,
rotation des tâches pour éviter une exposition continue au soleil,
mise à disposition d'adaptations techniques : ventilateurs, brumisateurs, stores...
arrêt du travail isolé pour un travail en équipe qui permet aux salarié de se "surveiller" mutuellement,
report des activités physiques difficile, la pénibilité d'une tâche étant un facteur aggravant.Si des missions éprouvantes doivent être effectuées, il faudra veiller à généraliser l'utilisation d'aides mécaniques à la manutention. L'INRS met aussi en garde contre les risques d'accident, la chaleur induisant une diminution de la vigilance et une hausse des temps de réaction.

Les nouveaux salariés ou intérimaires exigent une surveillance accrue de la part des managers, puisqu'il faut en moyenne huit jours pour que l'organisme s'adapte à la chaleur.
De l'importance d'informer les employés sur les risques encourus

L'Institut recommande également aux employeurs d'informer leurs salariés sur les symptômes liés à la chaleur : fatigue, sueur abondante, nausées, maux de tête, vertiges, crampes... Des troubles qui peuvent être annonceurs de déshydratation ou d'hyperthermie.
Autre disposition conseillée, un rappel préventif aux salariés des bonnes habitudes à adopter : boire de l'eau régulièrement et sans attendre la sensation de soif, porter des vêtements amples, légers et de couleurs plutôt claires, se protéger la tête du soleil, signaler les sources de risques (fontaine à eau ou climatisation en panne, par exemple), adapter son rythme de travail, éteindre le matériel électrique non utilisé qui peut être source de chaleur...
Les salariés peuvent arrêter leur activité pour "motif raisonnable"

Si les représentants du CHSCT peuvent alerter l'employeur en cas de risques pour les collaborateurs, les salariés peuvent aussi exercer un droit de retrait (article L 4131-1) s'ils estiment être en situation de danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé. Ils doivent alors pouvoir prouver que cette initiative se base sur un "motif raisonnable" et l'employeur a la possibilité d'accepter ou non ce droit de retrait. En cas de refus, c'est le juge qui tranche et détermine si le motif était "raisonnable" ou non. Pour Maître Éric Rocheblave, avocat spécialiste en Droit du Travail : "si l'entreprise n'a rien fait pour remédier à la chaleur et au bien-être de ses salariés, cela peut d'ores et déjà constituer un motif raisonnable".


Il rappelle d'ailleurs que "pendant l'été 2003, un employé dans le bâtiment travaillant sur un toit avait été licencié parce qu'il avait refusé de travailler plus de 5 heures. En 2010, le licenciement de ce monsieur a été déclaré «nul» par la cour d'appel."
L'Allemagne, exemple à suivre ?

Chez nos voisins, les règles sont plus nombreuses et plus restrictives. Dès que la température de l'environnement de travail atteint les 27°C, l'employeur est tenu de réduire le temps de travail de ses salariés. Si le thermomètre grimpe à 29°C, il devient impossible d'exiger plus de 4 heures de présence et, dès 35°C, il doit inviter ses employés à quitter les lieux... Rien ne l'empêche par contre de solliciter leur présence aux heures les plus fraîches.

Alors que les économistes français sont de plus en plus nombreux à prôner l'imitation du modèle allemand, en ces temps de fortes chaleurs, c'est sans doute au tour des salariés de l'Hexagone d'envier le droit du travail outre-Rhin.

Crédit images : Guian Bolisay ; Anthony Quintano ; Wikemedia ; A. Davey / CC BY 2.0

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